Une slideshare de 2013, publiée par Velocity, insolente et prémonitoire, questionnait les risques d’un « déluge » de contenus et les enjeux en terme de content marketing qui en découlaient. A l’aube d’autres révolutions, liées elles aussi à la place centrale du contenu, tirons-en les enseignements pour ne pas louper cette transition. Évitons d’être submergés par du contenu « bullshit » et inventons le contenu de demain ! Étonnement d’actualité. #keystonemovie
Crap Content = « Contenu de merde »
La fameuse Slideshare publiée par l’agence londonienne de Content Marketing B to B, Velocity, avait retenu mon attention par son ton décalé, militant et impertinent.
Cela avait fait un vrai buzz en 2013 avec plus de 4 millions de vues et était particulièrement visionnaire à un moment où le content marketing gagnait ses lettres de noblesse. Le titre, qui ne faisait pas dans la dentelle, faisait référence à une déferlante (« the deluge ») de contenus de qualité plus que médiocre et avait le mérite d’être explicite : « Crap ». Traduction littérale : « contenu merdique », avec une couronne sur le « P », noblesse oblige.
A l’aube d’une nouvelle déferlante de contenus et au moment où tous les clients n’ont plus que les mots « content » ou « storytelling » à la bouche, le pavé dans la mare de Velocity reste plus que jamais d’actualité. C’est aussi un bel exemple de contenu de grande qualité associant la forme et le fond avec succès. La preuve : nous la partageons sans hésiter (rendons à César…).
Résumons ce doc de 50 pages, sans forcément le traduire mot à mot, et tirons-en par nos observations des enseignements en 5 points :
1/ Premier constat : « Trop de contenu tue le contenu »
C’est une traduction non littérale, mais elle exprime bien la problématique abordée : la ruée vers le Content Marketing (« and so on, and so on… », « Lots and lots and lots more content ») et l’afflux de contenus de faible qualité :
- Le fossé se creuse entre les compétences nécessaires en interne et la course à la production de contenu,
- Les agences SEO et Social Media produisent du contenu à la chaîne (« content marketing shops »),
- Un déluge de prestation digitale se dit « Rich content »,
- Une multitude d’agences B to B nous « bourre le crâne » autour du « Content »
Notre grain de sel :
Bien dit et à mon sens cela n’a pas pris une ride; mais aujourd’hui, qu’est-ce-que cela nous apprend sur les bonnes pratiques à mettre en œuvre ? Voici quelques pistes à développer pour faire face au constat sans appel de Velocity, à nouveau d’actualité :
- Développer des compétences en interne autour du contenu et repérer les collaborateurs experts,
- Ne pas se précipiter sur l’outsourcing mais trouver des prestataires adaptés à votre maturité numérique et à chaque étape de votre développement (stratégie, production de contenu, mesure et marketing automation,…),
- Ne pas se fier à l’effet de mode mais se focaliser sur ses objectifs et le besoin de ses clients.
2/ Second constat : « Ça a la couleur et le goût d’un contenu de qualité…mais ce n’est pas un contenu de qualité »
- Des articles creux et auto-centrés (« Me-too blog posts », j’adore la formule)
- Du recyclage sans intérêt (« Three-Sentence ideas pumped up into 36-page eBooks », on a tous tendance à y succomber plus ou moins)
- Des interviews « bla bla bla » (« video interviews that might as well be subtitled, « Yadda-yadda-yadda. »)
- Des titres accrocheurs, des chapôs aguicheurs, du design dans l’air du temps
Le tout, pour un résultat qui fait mal (« Ouch ») :
- Moins de trafic
- Peu de pages vues
- Peu de conversions, de téléchargements, de formulaires remplis
- Moins de leads
- Moins de CA
Notre grain de sel :
Je trouve que relier la cause à l’effet est extrêmement fort dans la démonstration. Cela rappelle le principe même d’une stratégie de Content ou d’Inbound et un de ses principaux arguments :
Un meilleur contenu pour plus de trafic ou de leads.
Au delà de cette évidence, l’enseignement est primordial : il ne s’agit pas de tricher, de faire comme si. Au final, la sentence sera irrévocable et à l’opposé des objectifs souhaités si le contenu produit n’est pas authentique. Cette authenticité est à trouver dans la promesse de la marque, ses valeurs, ses causes, sa passion, son engagement.
3/ La solution : « Après le déluge, construire quelque chose de précieux »
Les gagnants seront ceux qui construiront ce que Velocity nomme…« Great Content Brands ». Difficile de traduire mais il s’agit clairement d’un contenu de grande qualité, ce que nous appelons souvent « la valeur contenu » avec trois grands principes :
- Qualité et pertinence pour viser haut (« Great »)
- Du contenu, toujours du contenu, ne parler ni de produits ni de services (« Content »)
- Une marque est une promesse, une marque forte tient sa promesse (« Brands »)
Quant à résumer « un contenu de qualité », voici une définition possible parmi d’autres :
- Intelligent : aucune condescendance, ne pas sous-estimer son audience
- Utile : l’essence même du content marketing
- Divertissant : pas au sens d’ « en faire tout un cirque », mais plutôt un contenu assumé, clair, facile à lire, avec du caractère et de l’énergie
Notre grain de sel :
J’ajouterais, mais cela se recoupe :
- Un contenu qui informe et éduque
- Un contenu qui inspire (qui donne envie de partager et d’agir)
- Un contenu qui donne du sens (peut-être même au delà de son utilité première)
Et pour être tout à fait complet, je l’associerais à chaque étape de l’expérience client :
- Phase de découverte : un contenu éducatif, informatif et divertissant
- Phase d’évaluation : un contenu utile
- Phase de décision et d’enchantement : un contenu qui donne du sens et qui inspire
4/ Les six commandements du Content Marketing (« Six Principles of Great content Brands »)
- Mettez-vous à la place de vos clients (« Be the buyer »)
- Clamez votre expertise (« Be authoritative »)
- Soyez stratégique (« Be strategic »)
- Soyez prolifiques (« Be prolific »)
- Soyez passionnés (« Be passionate »)
- Soyez durs avec vous-mêmes (« Be tough on yourself »)
Notre grain de sel :
Les trois premiers principes décrits par Velocity nous ramènent à la stratégie préalable à toute production de contenus (positionnement, objectifs et persona) ainsi qu’à la détermination nécessaire de son Sweet Spot, intersection entre sa propre expertise et l’attente de son audience. Vous pouvez lire d’ailleurs à ce propos notre article concernant le Sweet Spot, une clé pour définir votre positionnement éditorial ou utiliser le modèle du Golden Circle qui vous incite à ne plus raconter ce que vous faites mais pourquoi vous le faites.
Quant à être prolifiques, passionnés et exigeants, c’est il me semble un point moins débattu mais au cœur d’une stratégie éditoriale réussie.
Pour reprendre la métaphore sportive utilisée dans le document, on a souvent tendance à faire une course de vitesse quand on produit du contenu, alors qu’il faudrait s’atteler à une course de fond. Au moment de la création d’un site corporate, au lancement d’un réseau social ou d’une campagne emailing, la motivation est au top et la « machine contenus » produit à plein régime.
Le média reste le prétexte, le déclencheur d’une production de contenu. Cette dernière a cependant du mal à résister à la durée, au renouvellement. C’est pourtant là que se joue toute la différence.
Pour éviter ce travers (épuisement des ressources, baisse de motivation, parfois même laxisme et laisser-allez), il s’agit d’être plutôt un marathonien de la production de contenu. Voici quelques pistes pour y parvenir :
- Élaborer une ligne éditoriale aboutie (style, ton, thèmes,…) pour garder un cap
- Travailler avec rigueur le planning éditorial
- Tester différents média, associer la forme au fond, c’est une garantie de renouvellement
- Engager les experts en interne, beaucoup parmi vous aime écrire !
- Benchmarker en permanence (design, articles de presse,…)
- Lâchez-vous, faites-vous plaisir
5/ Les bénéfices de la valeur contenu (« Great Content Brands ») et ses enjeux
- Les résultats, toujours les résultats : avec en ligne de mire le ROI
- La stratégie du « like and share » : un contenu de qualité entraînera le cercle vertueux du partage
- Le meilleur contenu appellera les meilleurs producteurs de contenu (ou comment étoffer ses équipes éditoriales)
La conclusion est quant à elle limpide : le « déluge » (« trop de contenu tue le contenu ») est bien présent et la pression à produire toujours plus de contenu bien réelle.
L’enjeu (devenir son propre média avec un de contenu de qualité) n’a du coup jamais été aussi important.
C’est le défi, le point critique, proposé par Velocity en 2013 et que l’on peut faire sien en 2017.
C’est ce qui fera la différence entre une machine à produire du contenu efficace (« an efficient content machine ») et une stratégie tournée vers la valeur contenu (« a Great Content Brand »).